Voter par optimisme
Ce texte a d’abord paru dans le journal Métro Montréal le 3 avril 2014
J’irai voter lundi parce que je crois en nous. Je suis convaincu que plus nous serons nombreux à faire vivre la démocratie, mieux la politique se portera, meilleurs seront les candidats et les décisions que prennent les élus. Je voterai lundi par optimisme. Pour défier le destin. Pour sortir de la morosité. Pour faire ma part et remplir mon devoir.
Je sais, cette campagne fut l’une des plus déprimantes des dernières décennies. Bien des gens sont tentés par l’abstention. Ce serait abdiquer devant l’incompétence. L’incompétence des partis et des politiciens à nous mobiliser autour de causes communes pour un avenir meilleur. Durant cette campagne, c’est le pire de nous, nos inclinations les moins nobles qui furent sollicités. Nos peurs, nos préjugés, notre cupidité.
Peur du référendum, préjugés envers l’étranger et sa religion, désir d’obtenir tous les services publics tout en refusant d’en payer le prix.
Ne pas voter serait donner raison à ceux qui nous découragent de la politique.
La campagne a aussi braqué les projecteurs sur les inégalités de richesse dans notre société, et donc sur un motif de colère, notamment en mettant à l’avant-plan la fortune des chefs et de certains candidats vedette.
Assez riche pour placer des fonds dans un paradis fiscal. Ou trop riche pour dévoiler ses actifs. Ou juste assez pour montrer le fruit de ses succès en affaires. Mais pas au point de vendre ses actions même si celles-ci placent un ministre putatif en conflit d’intérêt.
Il n’y a pas de mal à avoir fait fortune, surtout à la sueur de son front. C’est le contraste entre la richesse affichée et l’inexistence de propositions pour réduire les inégalités sociales, thème totalement absent de la campagne, qui choque.
C’est aussi l’indécence avec laquelle l’on se justifie parfois.
Encore hier, voir le candidat Gaétan Barrette, se justifier d’une prime de départ de 1,2 million de dollars, ajoutait au malaise ambiant. Lui qui a arraché au gouvernement des hausses de rémunération d’un milliard pour les médecins spécialistes sans offrir plus de services aux citoyens, au moment où le système de santé craque de partout ; le voici quittant son poste à la présidence de la Fédération des médecins spécialistes pour se porter candidat libéral avec dans sa poche plus d’argent que la majorité des Québécois n’en gagneront jamais dans leur vie. Une récompense à l’égoïsme.
La colère devrait inciter au vote et non le contraire.
Pour qui voter alors ? Peut-être pour celui ou celle, candidat local, qui offre le plus de potentiel d’améliorer les choses. Ou voter pour une femme, un jeune ou un immigré pour diversifier la composition de l’Assemblée. Ou pour un tiers parti qui incarne vos valeurs et dont les élus empêcheront que le pouvoir ne soit entièrement confisqué. À vous de voir. Mais s’il-vous-plaît, votez.